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Survol des pratiques d’affaires écoresponsables au Bas-St-Laurent

Par Mylène Joncas, agente au Fonds Écoleader

Bien niché entre le fleuve Saint-Laurent et les Appalaches, le territoire du Bas-Saint-Laurent (BSL) constitue une large bande de terre qui se distingue par sa géographie héritée du passage de mers anciennes. Sa situation géographique procure nourriture et abri à de nombreuses populations depuis la nuit des temps. Le climat marin côtoie les montagnes, les terrasses marines, les forêts et les vallées, lui conférant une diversité de paysages et de ressources – et offre une qualité de vie inégalée à ses occupants.

Comme partout au Québec, un(e) agent(e) du Fonds Écoleader (FÉ) est accueilli par une organisation pilier de sa région. Créneau Écoconstruction a été choisi au Bas-Saint-Laurent en raison de ses enjeux communs avec le Fonds Écoleader. Soutenu par la démarche ACCORD , le Créneau œuvre en collaboration avec une myriade d’intervenants qui à leur manière, contribuent à promouvoir les choix les plus écologiques en construction. Même si le FÉ s’adresse à tous les secteurs d’activité économique, la majorité des entreprises doivent aussi gérer un bâtiment. La collaboration était donc d’un naturel! Les deux instances font avancer leur mission respective au sein du SEREX, un centre collégial de transfert de technologie (CCTT) œuvrant dans la transformation des produits forestiers.

PORTRAIT ÉCONOMIQUE : DES RESSOURCES UNIQUES

Comme ailleurs, les ressources disponibles ont influencé la dynamique du territoire. Ce n’est pas un hasard si on trouve au Bas-St-Laurent une économie axée sur les secteurs primaires comme l’agriculture, la foresterie, la tourbe et les ressources marines. Ces secteurs fournissent de l’emploi à trois fois plus de personnes dans cette région que dans l’ensemble des régions du Québec (7,5 % au BSL contre 2,2 % en moyenne). Ici, les entreprises des secteurs de l’écoconstruction, de la tourbe et de ses substrats et les sciences et technologies marines sont regroupées en trois créneaux d’excellence. Ces regroupements confèrent aux entreprises une notoriété certes régionale, même internationale. Tout dernièrement, un créneau acéricole était créé. Enfin, d’autres secteurs d’activité, comme le tourisme et le bioalimentaire, sont tout aussi présents dans la région et participent activement à l’économie régionale.

Le tourisme

Longtemps considérée comme une voie de passage entre les centres urbains et la Gaspésie, la région du BSL s’est imposée dans le cœur des visiteurs en raison de ses paysages. Hébergement, restauration, parcs nationaux et autres territoires fauniques, sans oublier l’offre culturelle croissante, occupent les séjours des visiteurs. Ces derniers augmentent d’année en année leur nombre de nuitées dans la « Réserve mondiale de bon temps »!

Pour satisfaire sa clientèle grandissante dans un souci de protection de l’environnement, l’industrie touristique régionale doit présenter une offre permettant de profiter de la région en toute écoresponsabilité. Axée sur les activités de chasse, de pêche et de plein air, on peut dire que l’entreprise TERFA a flairé la bonne piste! Cet organisme sans but lucratif situé à 30 km au sud de Rimouski met en valeur un territoire immense parsemé de plans d’eau comme nul autre dans la région, et ce, au cœur d’une forêt exceptionnelle. TERFA a repensé sa stratégie d’affaires en offrant une villégiature écoresponsable pour atténuer l’impact des séjours. Avec le soutien du programme de financement du Fonds Écoleader, l’organisation est actuellement en pleine éco-conception de son nouveau bâtiment d’accueil. Un projet à suivre de près!

Le maritime

L’histoire nous enseigne que le Saint-Laurent a longtemps été la principale voie de communication entre l’est du Québec et ses régions fortement urbanisées. Les usages ont évolué et, aujourd’hui, une économie y est bien ancrée. L’Association des croisières du Saint-Laurent fait des heureux en faisant découvrir le Québec maritime aux croisiéristes. On peut dire que le vent tourne pour cette entreprise d’économie sociale : elle a décidé de mettre le cap sur le développement durable. Les possibilités sont multiples et, pour sortir du brouillard, l’entreprise s’est tournée vers le programme de financement du Fonds Écoleader afin de bénéficier d’une ressource professionnelle pour identifier les priorités d’action et atteindre une bonne vitesse de croisière!

L’entreprise OrganicOcean surfe en toute aisance sur la vague écoresponsable avec son modèle d’affaires où figurent de nombreuses pratiques écoresponsables dans le domaine de la transformation de produits d’origine marine. L’entreprise prélève des algues et les transforme en une variété de biostimulants destinés à la nutrition des plantes. Ainsi, de la mer à la terre, elle produit un intrant agricole biologique tout en veillant à ce que tous les résidus de production soient valorisés. Dans une approche d’amélioration continue, OrganicOcean développe des technologies vertes respectueuses de l’environnement et contribue à structurer une agriculture responsable et durable.

La tourbe et ses substrats

La région n’est pas le berceau de la tourbe horticole pour rien : la récolte de la tourbe y est pratiquée depuis près de 90 ans! Puisqu’elle prend des milliers d’années à se régénérer, la tourbe a longtemps été considérée comme une ressource non renouvelable. Avec les avancées des dernières décennies, la restauration des tourbières s’implante dans les pratiques des producteurs, ce qui a fait migrer cette ressource du côté des celles qui sont dorénavant « considérées renouvelables ».

Berger, Premier Tech Horticulture, Les Tourbes Nirom, Tourbière Réal Michaud et Fils et Tourbières Lambert, notamment, sont parmi les membres de l’Association des producteurs de tourbe horticole du Québec (APTHQ) et du créneau d’excellence ACCORD Tourbe et substrats. Sachant que l’exploitation des tourbières libère du carbone enfoui depuis des milliers d’années, ces entreprises engagées coordonnent leurs efforts pour développer les meilleures pratiques et rendre l’industrie de la tourbe plus écologique. Depuis plus de 25 ans, elles financent la recherche universitaire sur les fonctions et sur la restauration des tourbières.

En travaillant de concert, elles ont établi les balises de la norme Veriflora®, la certification en gestion responsable des tourbières. Cette norme constitue l’assurance de l’application de bonnes pratiques de gestion, dans une perspective de développement durable. Avec la Chaire en éco-conseil de l’Université du Québec à Chicoutimi, l’Association finalise également un outil de calcul des GES qui permettra d’identifier les points chauds des opérations et d’apporter des correctifs. Avec un coup de main de la science, des sites qui prenaient des milliers d’années à se régénérer prennent dorénavant 10 à 15 ans.

La forêt

Bien implantés depuis plusieurs générations, les domaines de la foresterie, de la transformation du bois et de la construction confèrent au Bas Saint-Laurent une notoriété nord-américaine dans le développement, la production et l’utilisation de produits à moindres impacts environnementaux. Les entreprises d’ici ont bien compris le potentiel d’économie circulaire de la filière du bois. Devant la baisse de demande pour l’industrie des pâtes et papiers, les entreprises de transformation du bois se tournent vers d’autres possibilités pour valoriser les sciures et les copeaux. À ce propos, Damabois, une scierie fabriquant des composantes de palettes, réintègre ses propres résidus de production dans un nouveau modèle de palette pressée-moulée. Elle est la première entreprise canadienne à produire ce type de palette. Le procédé qu’elle utilise permet de valoriser la totalité de la matière première… et la boucle se boucle!

Des entreprises de la troisième transformation du bois sortent aussi du lot. C’est le cas de Miralis, qui se positionne en développement durable. Sa mission : concevoir une cuisine intemporelle et adaptée à l’art de vivre. Chez Miralis, tout est pensé dans le souci de l’environnement et du bien-être des employés. L’entreprise n’hésite pas à adopter des techniques novatrices et des technologies propres pour assurer une performance qui répond aux plus hauts standards environnementaux. C’est dans cette perspective qu’on y réutilise en boucle les solvants qui servent au nettoyage des équipements de peinture et de vernissage. L’acquisition d’un nouveau recycleur de solvant permet de récupérer et de réutiliser 100 % des solvants usés!

Pour inspirer l’industrie, les Jardins de Métis accueillent sur leur site la Maison ERE 132, vitrine d’excellence en écoconstruction. La réalisation de ce projet a mobilisé plusieurs partenaires, dont le Créneau Écoconstruction, et a fait appel à toute la chaîne de savoir-faire dans le domaine du bâtiment écologique au BSL, de la conception du projet jusqu’au monitorage des performances énergétiques du bâtiment. Située sur l’un des plus beaux sites touristiques de la région, la Maison ERE 132 émerveille les visiteurs et demeure la preuve tangible que la construction verte est performante et accessible.

Le bioalimentaire

Ne passons pas sous silence l’industrie bioalimentaire, l’un des moteurs du développement économique en milieu rural à l’échelle du territoire. Au cours des vingt dernières années, l’agriculture s’est transformée, passant de la ferme familiale à des entreprises plus industrielles recourant à l’automatisation afin de répondre aux enjeux de main-d’œuvre et de productivité. Les principales productions sont acéricoles, porcines, bovines, laitières, céréalières, oléagineuses et oléoprotéagineuses. Ces cinq types de productions génèrent près de 90 % des revenus agricoles de la région.

De plus en plus de voix s’élèvent au Québec pour une alimentation 100 % locale et le phénomène a pris de l’ampleur en contexte de pandémie. Or, le potentiel agroalimentaire du Bas-Saint-Laurent est grand! Les artisans du secteur de la transformation alimentaire font preuve de résilience et relèvent le défi. La réputée cheffe Colombe Saint-Pierre n’entrevoyait pas l’ouverture de son restaurant dans le contexte de la crise. Il n’en fallait pas plus pour que l’équipe concrétise un rêve : la bouffe de rue. Deux conteneurs rouges sont apparus près du restaurant : la Cantine côtière était sur pied! Guédille au flétan, egg roll de calmar et salade de laitue de mer sont au menu. On y sert désormais des mets pleins d’originalité, aux saveurs du Saint-Laurent.

La Fromagerie des Basques fait aussi preuve d’innovation devant l’adversité. Face à une contrainte de coûts et à la gestion des résidus de production, l’entreprise s’est retroussé les manches et est passée à l’action en se servant de ses résidus, voués à la destruction, pour produire sa propre énergie! Depuis, les bâtiments de l’entreprise sont alimentés au gaz naturel produit à partir des résidus de production de fromage, par biométhanisation. Le gaz naturel produit génère de l’énergie en évitant l’émission de gaz à effet de serre, sans compter l’expertise qui s’est développée durant la réalisation du projet!

Enfin, dans le but d’assurer une utilisation des ressources qui soit innovante, juste et pérenne, un écosystème du savoir s’est mis en place au fil du temps. On trouve donc au BSL une université, des cégeps, des centres de recherche et des centres collégiaux de transfert de technologie qui œuvrent au développement de connaissances et de savoir-faire afin de maintenir la dynamique des collectivités. Si une démographie en décroissance est projetée pour les prochaines décennies, la pandémie actuelle semble avoir ravivé l’intérêt pour la vie rurale et l’attractivité des régions non fortement urbanisées.

PRATIQUES ÉCORESPONSABLES : POUR L’AUTONOMIE LOCALE!

Les entreprises du Bas-Saint-Laurent montrent un intérêt grandissant pour les pratiques écoresponsables, mais les initiatives inspirantes sont souvent des secrets bien gardés (pour l’instant)! On peut citer l’exemple du Kamouraska, qui mobilise son milieu par un accompagnement stratégique des entreprises en économie circulaire. La Matanie anime également une symbiose industrielle depuis quelques années. Les résultats probants de ces deux initiatives ont permis de générer une démarche rassemblant des acteurs de toute la région au sein du projet Synergie BSL.

Par ailleurs, la Régie intermunicipale de l’énergie du Bas-Saint-Laurent a été créée pour gérer et développer des parcs éoliens au bénéfice des communautés locales. Dans la même lignée, la démarche Par Notre Propre Énergie, pilotée par le Conseil régional de l’environnement du BSL, permettra de tracer des balises pour réaliser la transition énergétique. Des centres de recherches développent aussi des solutions novatrices pour remplacer les ressources non renouvelables. Ces recherches portent notamment sur la biomasse forestière, les produits biosourcés, la filière du lin ou la valorisation à partir de champignons. Enfin, on sent que les efforts sont redoublés pour renforcer l’autonomie locale.

ENJEUX ET DÉFIS : UN GRAND TERRITOIRE À PROTÉGER

Le grand air et la disponibilité des espaces au BSL donnent une fausse impression quant au travail à faire pour la transition écologique. La réalité du territoire nous laisse croire qu’il y a encore une marge de manœuvre, alors que nous sommes dans le même bateau que les autres régions! À cela s’ajoute la gestion du changement. Les démarches sont souvent initiées par quelques organismes de développement économique qui font de leur mieux pour mobiliser les entrepreneurs pour changer les comportements au profit de meilleures pratiques. Les coûts à absorber sont souvent une barrière aux bonnes intentions de plusieurs d’entre eux. Et pourtant, nous savons aujourd’hui que le retour sur l’investissement en vaut les coûts initiaux!

Bref, on peut dire que le Bas-Saint-Laurent détient un potentiel énorme pour répondre aux besoins de sa population. Il ne reste qu’à unir nos forces pour établir une stratégie régionale écoresponsable afin d’avancer collectivement pour un impact plus grand.

Surveillez les articles d’entreprises leaders de la région dans nos réseaux, pour découvrir leurs projets inspirants en détail.


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