Financé par le Fonds écoleader
  • Gestion des matières résiduelles

Mettre fin au gaspillage alimentaire : des solutions pour l’industrie de l’alimentation

Par Jessy Fournier, agent du Fonds Écoleader en Montérégie

Le gaspillage alimentaire concerne tous les acteurs de l’industrie alimentaire. Sachant qu’il compte pour 8 % des émissions de gaz à effet de serre à l’échelle mondiale [1], plusieurs organisations œuvrant dans ce secteur décident de passer à l’action. C’est notamment le cas d’Agropur qui s’est dotée d’un plan stratégique en développement durable qui établit la réduction du gaspillage alimentaire comme un des enjeux les plus urgents sur lesquels agir.

Fondée en 1938, Agropur compte 2974 producteurs membres et plus de 7 700 employés. Avec un chiffre d’affaires de 7,7 milliards de dollars canadiens en 2020, elle est l’un des 20 premiers transformateurs laitiers au monde. Ayant un modèle d’affaires qui s’étend de la ferme à la distribution, en passant par la transformation des produits laitiers, la coopérative peut agir à plusieurs étapes pour diminuer le gaspillage alimentaire.

Mais atteindre un tel objectif de durabilité peut être risqué, particulièrement dans un contexte de pénurie de main-d’œuvre où chaque dollar doit être maximisé. C’est pourquoi Agropur et son partenaire le Centre de Développement Bioalimentaire du Québec (CDBQ) ont fait appel au Fonds Écoleader, qui leur a permis de mettre en œuvre une nouvelle pratique de surcyclage de fromages fins.

S’inspirer de l’économie circulaire pour réduire et revaloriser

Suivant les meilleures pratiques de l’économie circulaire, la première action de la coopérative a été de réduire à la source les pertes alimentaires avant même de parler de revalorisation et de projet au Fonds Écoleader. La stratégie a été avantageuse, car : « par l’amélioration des outils de gestion des achats-ventes-production, la coopérative a réussi à réduire de 33 % (2019-2022) les pertes de produits et a identifié des opportunités de valorisation sur les produits où la fluctuation des ventes demeure difficile à anticiper », explique Michel Pouliot, Scientifique en chef au siège social de l’organisation à Saint-Hubert.

En débutant par réduire à la source, l’entreprise a été ensuite en mesure d’identifier les gammes de produits où cette optimisation achats-ventes-production demeurait imprévisible. C’est le cas notamment des fromages fins qui en raison d’une durée de vie relativement courte, couplée à une variation importante des volumes d’achats pour des raisons diverses et surprenantes (comme la météo) restaient suffisamment importants pour justifier des investissements en recherche.

L’appui du Fonds Écoleader

Bien que le potentiel de revalorisation des fromages fins devînt de plus en plus évident, l’équipe de M. Pouliot s’est retrouvée confrontée, comme plusieurs entreprises, à des enjeux de ressources humaines à un moment où la recherche pour le surcyclage des fromages fins demandait une expertise fine et une prise de risques financiers.

C’est à cette étape que l’appui du Fonds Écoleader a été d’une grande importance. Il a permis de réaliser beaucoup plus de travail avec le même budget et de diminuer les risques relatifs au développement d’une solution technique. Le partenariat avec le CDBQ a quant à lui permis de diminuer les enjeux de ressources humaines grâce à l’ajout de leur expertise de pointe dans le domaine de la transformation alimentaire.

La réalisation du projet : le surcyclage des fromages fins

Pour prolonger la dure vie des produits de fromages fins et permettre de nouvelles possibilités de valorisation pour l’alimentation humaine, les équipes d’Agropur et du CDBQ ont déposé un projet au Fonds Écoleader qui se divisait en trois étapes :

  1. Évaluer et caractériser la matière première disponible et identifier les pistes de stabilisation et de rehaussement de saveur par modification enzymatique.
  2. Proposer un plan d’action pour l’établissement d’un procédé de surcyclage par modification enzymatique selon les types de fromages (3 catégories), incluant la façon de produire les ingrédients aromatiques et des recommandations pour leur incorporation dans les préparations de fromages fondus ou à cuisson d’Agropur.
  3. Supporter l’implantation du procédé de surcyclage de ses matières premières : en produisant de la documentation détaillée et de l’assistance technique dans la recherche d’équipements et de fournisseurs.

    Un succès technique de surcyclage alimentaire

Le projet a été un succès technique.  Il a permis de démontrer la faisabilité du surcyclage des fromages fins et du même coup d’avoir une solution fonctionnelle pour stimuler l’intérêt de l’industrie de la transformation alimentaire à s’engager dans cette voie.

En revanche, malgré la démonstration faite d’une solution de valorisation, le développement du marché en vue de son adoption par les consommateurs prendra encore quelque temps. Ce qui conduit M. Pouliot à dire : « un bénéfice collatéral d’un projet comme celui-ci a été de démontrer qu’une solution technologique ne permet pas automatiquement une réussite commerciale et qu’il faut regarder ces situations de plusieurs angles. »

Finalement, bien que la commercialisation reste à faire, les spécialistes en innovation d’Agropur ont, grâce au partenariat avec les experts du CDBQ et le Fonds Écoleader, franchi plus rapidement une étape importante vers la mise en place d’une pratique d’affaires écoresponsable.

[1]https://impact.canada.ca/fr/defis/defi-reduction-du-gaspillage-alimentaire